Agueusie et anosmie, pathologies sous-estimées

Covid oblige, le spectre des publics concernés par l'agueusie et l'anosmie tend à s'élargir de manière significative. Marie-Claire Thareau, nutritionniste, revient sur les conséquences de ces dysfonctionnements sensoriels et les solutions pour y remédier.

Marie-Claire Thareau, ingénieur agronome, nutritionniste et sophrologue - POMMES et Sens, publié le 02 décembre 2022

Agueusie et anosmie, pathologies sous-estimées

Les personnes concernées par les perturbations du goût et de l’odorat souffrent d’agueusie (perte totale ou partielle du goût) et d’anosmie (perte totale ou partielle de l’odorat). Ce sont des symptômes typiques du Covid-19. Cette pathologie peut être très difficile à vivre car elle se concrétise par la perte soudaine de deux sens que nous sollicitons quotidiennement, souvent sans nous en rendre compte.

Ainsi, le goût et l’odorat sont des sens primordiaux dont nous prenons surtout conscience lorsque nous les perdons. Leur perte peut avoir également des répercussions sur la santé et la sécurité en entraînant une incapacité à déceler une odeur de gaz ou de brûlé, ainsi qu’une mauvaise appréciation de la qualité de l’alimentation.

 

Goût et odorat, sens essentiels et intimes

Ce sont deux sens distincts mais qui interagissent, en particulier au moment du repas, en apportant des informations venant du dedans : fonctions organiques et sensations affectives. D’une certaine manière, ils nous mettent en contact avec notre intimité ; nous dévoilant à nous-mêmes. Plus j’apprends à goûter, plus j’apprends à être connaisseur de ce que j’aime et par là même de qui je suis.

Le goût est lié à la perception des saveurs (sucré, salé, umami, acide, amer) en bouche, mais également à une perception globale. Si les deux sont étroitement liées c’est que pour les spécialistes le goût est à 90 % lié à la perception de l’odorat.

Ainsi, dans notre langage commun, nous nous exclamons sur le goût d’une tarte aux fraises, rarement sur son odeur. L’odorat est la capacité à sentir les odeurs présentes dans notre environnement et les arômes contenus dans nos aliments. Les substances volatiles remontent par les parois nasales jusqu’aux récepteurs olfactifs qui traduiront le signal neuronal en lien avec notre cerveau. Proche de l’hippocampe et de l’amygdale, le bulbe olfactif, lorsqu’il est stimulé, nous met rapidement en lien avec des souvenirs et des émotions.

 

Des pathologies sous-estimées avec des conséquences pour notre humanité

Or, ceux-ci sont vitaux ! Selon une étude, 60 % des personnes qui perdent l’odorat font une dépression sévère.

En cela, nous pouvons penser à nos aînés ; lorsque nos capacités à percevoir les odeurs et les saveurs s’atténuent, le plaisir que nous avons à manger diminue !

Plus généralement, on estime que 10 % de la population souffre sans le savoir de problème de perception des odeurs. À ce jour, peu de travaux de recherches ont été réalisés. Cela est dû principalement au fait que notre sens visuel, qui regroupe 70 % de nos récepteurs sensoriels, l’emporte sur nos autres sens (que serions-nous sans nos écrans !). Exacerbée, hyperdéveloppée, la vue prend souvent le dessus et s’impose à nous ; peu sollicités, nos sens du goût et de l’odorat disparaissent. Pour certains, cela s’accompagne d’une perte de contact avec la réalité vécue (préférant ce qui est beau à ce qui est bon !), d’un tarissement de l’imagination et d’une quasi-disparition de la création personnelle.

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