Alimentation et disparités sociales : 3 questions à Faustine Régnier, sociologue de l’alimentation
À l’occasion de la parution de son livre « Distinctions alimentaires », Faustine Régnier, sociologue de l’alimentation, nous livre sa réflexion sur les enjeux relatifs aux inégalités, à la santé et à l'écologie, tout en mettant en avant la centralité des saveurs dans notre rapport à l'alimentation.

Comment traitez-vous de l’alimentation dans vos travaux de recherche ?
Ces dernières années, j’ai cherché à comprendre quels étaient les goûts des différentes classes sociales en France et comment les normes circulent dans l’espace social. Dans les années 2017-2018, les dimensions de santé et d’environnement ont commencé à se cumuler et j’ai interrogé les injonctions en rapport avec une dimension environnementale. Je pense, par exemple, aux recommandations qui invitent à privilégier des aliments bio ou à réduire sa consommation de viande.
Quel est votre constat ?
Cette analyse met en exergue des clivages forts et persistants, voire en cours d’accroissement pour certains, entre catégories sociales quand il s’agit de percevoir ces différentes recommandations. Si les normes sont connues de tous, les individus des catégories aisées y adhèrent et les mettent aisément en pratique. Les personnes des catégories modestes y souscrivent moins et montrent des formes de mise à distance voire de rejet, notamment à propos des normes environnementales. Ainsi, les oppositions sociales se recomposent aujourd’hui autour de la consommation de viande, qui cristallise aujourd’hui les oppositions.
Quelles sont les raisons de cette fracture entre les différentes catégories sociales ?
Si la question du budget est centrale et incontournable, ce qui relève des représentations est également primordial. La question des enjeux environnementaux fait partie de ces représentations. Si « manger bio local et de saison » est un peu le triptyque idéal, dans les catégories modestes, c’est quelque chose de beaucoup moins présent et les enjeux environnementaux de l’alimentation gagneraient encore à faire l’objet de campagnes d’information.
S’y ajoutent des questions relatives à la représentation du corps, avec la quête de la minceur prégnante dans les catégories les plus aisées, des questions de genre ou encore de générations. Au final, tout l’enjeu est de réussir à articuler les questions sociales, de santé et d’environnement.
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